Aller ou non à ce bal a été une grande question. Je ne vois pas l’intérêt de danser. A part un risque évident de blessures en tout genre. Malgré les cours proposés par la directrice, il est statistiquement improbable que tous les élèves soient doués en danse. Dans le lot, certains seront très mauvais. Ce n’est pas une question de jugement mais de probabilité. Tout le monde ne peut pas avoir des talents dans tous les domaines. Je suis une piètre danseuse. En même temps, j’ai une coordination qui peut parfois atteindre un niveau proche du néant. Mes maladresses ne sont pas rares simplement en marchant. Il suffit qu’une pensée me traverse pour que j’oublie totalement mon environnement et pouf une catastrophe. Surtout quand ce n’est pas une activité qui capte l’ensemble de mon attention. Une rencontre avec Eilea m’a convaincu de porter une robe, de tester cette expérience et donc de venir à ce bal. Une excellente occasion de pouvoir réaliser une enquête à grande échelle sur les élèves de Poudlard. Comprendre pourquoi, ils participent à ce bal. Qu’est-ce qui peut motiver tant d’adolescents à vouloir ainsi y participer ? Cette perspective m’enthousiasme. Je vais préparer des hypothèses que je pourrais ainsi vérifier. Il faut que je me décide également sur les méthodes d’expérimentation que je vais utiliser.  

Tant de choses à penser et cela me procure une grande joie. Je vais pouvoir comprendre beaucoup de choses sur les êtres humains. Comprendre les mécanismes de fonctionnement d’un groupe. Est-ce que je pourrais créer un événement qui déclenche un mouvement de foule ?  Quels sont les déclencheurs d’un tel mouvement ? La seule chose problématique dans cette expérience est le danger que cela peut représenter. Les risques de blessures sont fortement probables lors d’un mouvement de panique. Bien trop dangereux pour que je me livre à cela. Le seul détail que je dois résoudre pour pouvoir aller au bal est de trouver un partenaire. Une obligation pour pouvoir accéder à la salle. J’ai parcouru la liste de mes amis. Mikaella, Matt et Alice sont en couple. Donc je ne peux pas aller avec eux. Je ne vais tout de même pas demander à Freyja ni à un adulte. La liste de mes amis n’est pas très longue et en réalité, il ne me reste qu’une seule possibilité. Je vais demander à Zach s’il veut bien. Je n’envisage même pas Aiden. Bien trop compliqué de venir avec lui. Après les cours, je pars donc à la recherche de mon ami en espérant qu’il n’ait pas encore trouvé un partenaire. Je finis par apercevoir sa chevelure alors que je monte un escalier. Il est installé sur un des rebords de fenêtre. « Coucou Zach. Est-ce que tu veux bien venir au bal avec moi s'il te plaît ? ». Je vais droit au but. Pourquoi prendre des détours alors que c’est la raison pour laquelle je veux le voir.  

Une seule question comptait en cet instant. Trouver un partenaire pour ce bal pour que je puisse pénétrer dans cette salle. Je souhaite y aller avec un ami et les possibilités sont minces au vu du nombre de personnes en couple. Un concept qui pour moi reste bien étrange et surtout effrayant. Au point que rien que penser à Aiden me donne envie de partir très loin. Je focalise toutes mes pensées sur Zach alors que je le cherche. Une fois que je l’ai trouvé, la demande sort juste après les salutations. Droit au but sans la moindre fioriture et je ne perds pas de temps avec des formalités. Je suis toujours ainsi quand j’ai des questions . Il semble totalement perplexe. Est-ce qu’il n’a pas compris? Est-ce un refus dissimulé? J’ai pourtant confiance en mon ami et en sa capacité à me dire non s’il refuse pour une quelconque raison.

Il est donc face à une perplexité qui va nécessiter que je répète ma question. “Est-ce que tu veux bien m’accompagner au bal s’il te plait? Cela va être une expérience sociologique très intéressante à observer mais je ne peux pas entrer seule. Tant de personnes réunies dans un objectif similaire pose tellement de questions. Je veux pouvoir observer et je vais même pouvoir faire paraître un questionnaire à ce sujet dans la gazette de Poudlard. Alors est-ce que tu veux bien s’il te plait? Tu es le seul à pouvoir m’accompagner”. Je suis certaine de moi alors que j’affirme ma dernière phrase. J’aimerais vraiment pouvoir observer tout le monde ainsi. J’espère que sa réponse sera positive alors que je lui ai exprimé franchement mes plans à ce sujet. La question devrait être cette fois plus claire car bien plus exhaustive en explication. Et le fait de répéter lui a laissé le temps de comprendre ce que je lui demande.

Il semble surpris par ma demande alors j’explique. J’aimerais qu’il m’accompagne afin que je puisse mener cette expérience, comprendre ceux qui participent au bal. Une simple expérimentation alors que le concept de la danse ne m’intéresse nullement. Cela représente simplement une occasion de pousser mes recherches plus loin. Sa réponse n’est pas entendable pour moi. Non ce n’est pas possible. Mon copain. Ces mots provoquent une rougeur instantané, une augmentation de mon rythme cardiaque immédiat. Un vent de panique s’installe dans l’ensemble de mon cœur. Le sujet que je veux absolument éviter. Je refuse ce sentiment bien trop complexe à gérer. Je me ferme comme une huître. Mes mots sortent sans la moindre neutralité, sans la moindre nuance. Les propos d’une adolescente comme une autre. “Je n’ai pas de copain. Aiden n’est pas mon copain”. Je le répète comme pour l’incruster dans la réalité, le graver dans le marbre. Mon débit est rapide, preuve que ma respiration s’est accélérée.

Preuve évidente que je suis perturbée alors que mon élocution est instable. “Je comprendrais si tu ne veux pas venir avec moi et je n’irais alors tout simplement pas”. Mon ton ne laisse supposer aucune autre possibilité. Pourtant mes propos ne sont pas du chantage. Simplement une réalité qui n'amènera aucun ressentiment. Je refuse tout simplement d’y aller avec Aiden car cela serait bien trop compliqué pour moi à gérer. Je ne veux pas me sentir perturbé toute la soirée, ne pas savoir comment me comporter. Je veux désormais savoir une seule chose: vient-il avec moi ou non. Je ne le questionne pas sur un autre, simplement sur lui. Pourquoi me parle t’il d’Aiden cela n’a rien à voir. Pourtant je ne lui pose pas une question. Elle ne peut pas sortir de mes lèvres alors que je refuse obstinément cette réalité.

La réponse est sans aucune ambiguïté. Je ne veux pas reconnaître mes sentiments à son égard. Je les nie totalement et je ne peux pas avoir d’autres réponses à sa question. Seulement un non qui sort sans aucune nuance. Je n'ai pas de copain et rien que d'y penser je sens mon cœur s'accélérer et je sens mes joues s'empourprer. Il continue avec ses autres questions. Le monde tourne à l'envers. Il interroge et le sujet me donne envie de fuir. Trop de questionnements auxquels je ne peux pas réfléchir. Non je peux tout simplement pas sinon une crise d'angoisse va me submerger. Il propose même de faire le hibou. "NON". Mon ton monte. Une chose rare alors que le sujet est bien trop complexe. Je me prends les mains dans la tête alors que ma respiration s'affole. Je crois bien que s'il continue, je vais juste faire demi-tour et je n'irai tout simplement pas à ce bal. Je trouverai une autre occasion de mettre la tenue d'Eilea.

"Il peut venir avec qui il veut, danser avec qui il veut. Et c'est pareil pour moi. Je viens pour observer. Tu es un ami à mes yeux donc je serai contente de venir avec toi. Est ce que tu veux bien m'accompagner s'il te plaît? Si tu ne veux pas tu le dis et c est pas grave". Il s'attend à quelle réaction de ma part ? De la jalousie ? Je ne suis même pas sûre d'être capable d'éprouver un tel sentiment. Encore faudrait-il penser que la personne nous appartient quand on est en co… Non, ne surtout pas penser à cela. Tout s'embrouille dans ma tête, tout devient bien trop compliqué. Je dois retrouver le rationnel, reprendre pied avec la réalité. Un élément de son discours me titille. Je saute dessus comme un naufragé sur une bouée de sauvetage. "Qu'est ce que cela signifie s'amuser ?" Enfin un sujet simple. Que de la logique de la compréhension. Qu'il ne parle plus d'Aiden sinon je m'enfuis. Juste une réponse par oui ou par non. Ce n'est pas compliqué.

Il est rare que mon ton soit aussi ferme alors que normalement, je me montre en tout temps calme et posée. Je suis bien plus dans des questionnements que dans des affirmations et cela me permet de rester neutre et de me garder éloigné de tout jugement. Un comportement que je ne veux surtout pas perpétuer. Pourtant le sujet Aiden et bal me panique totalement. Je ne veux surtout pas en entendre parler. Un sujet bien trop compliqué avec tant d’éléments que je ne trouve absolument pas rationnel. Je refuse en bloc ce sujet et mon “non” est bien trop affirmé pour que cela ne soit pas une indication claire de mon état émotionnel. Je veux simplement savoir s’il veut bien être mon cavalier ou non. S’il refuse, je comprendrais et je n’insisterais pas. Je lui demanderais sûrement pourquoi afin de comprendre ses motivations. Cette recherche de compréhension est essentielle pour moi. Je ne pourrai pas agir autrement en réalité. Cela va de pair avec les questions que je pose sans cesse.

Encore une fois, je le prouve en l’interrogeant sur le concept de l’amusement. Il y répond tout en m’apportant la réponse tant attendue. C’est assez étrange mais je ressens un soulagement qu’il accepte d’être mon partenaire pour me rendre à ce bal. Un instant de panique revient alors qu’il émet une condition. Va t’il me reparler d’Aiden? Mon corps est prêt à prendre la fuite mais il m’annonce que nous danserons ensemble. Son ton me fait bien plus penser à une affirmation qu’à une proposition. J’ai tant de questions à lui poser. Pourquoi tient-il tant à me faire danser? Je n’ai pas le temps car il s’en va comme s’il avait anticipé le flot de questions que j’allais lui poser. Son geste m’intrigue encore plus. Il faudra que je lui demande des explications la prochaine fois que nous nous croiserons. Peut-être lors du bal mais sa volonté de s’en aller est une preuve que ce n’est pas le moment de lui poser des questions. Cela éloigne aussi le sujet Aiden pour mon plus grand soulagement.