Ronde nocturne

Feat. Frank Herr

Lorsque Roman avait postulé à Poudlard, il y avait un devoir qu’il n’avait pas envisagé, lui qui avait passé une scolarité tranquille, à rester dans les clous et à respecter scrupuleusement le règlement (malgré les tentatives de Selwyn de le corrompre plus que de raison) : la surveillance des couloirs de l’école, le soir, pour s’assurer que les élèves ne traînent pas n’importe où. Il pouvait comprendre qu’ils aient envie d’explorer l’école. Des fois il se demandait si les Fondateurs n’avaient pas créé le lieu comme une espèce d’épreuve de survie ou d’initiation pour les futures générations. S’ils survivaient aux escaliers et aux dédales de couloirs ou s’ils découvraient les merveilles dont recélait encore Poudlard aujourd’hui, ils seraient des sorciers exemplaires… Roman préférait cette version à celle qui disait que Poufsouffle et consorts s’étaient juste fait plaisir sans penser au danger potentiel pour les élèves.

Les professeurs étaient donc préposés à des rondes régulières, pour s’assurer notamment qu’aucun élève n’était coincé dans les escaliers (c’était déjà arrivé à Roman en Deuxième année). Ce soir là, Frank et lui étaient chargés de patrouiller le rez-de-chaussée. Apparemment, des élèves avaient été aperçus quittant l’école, aussi devaient-ils surveiller le Hall d’entrée et ses environs.

Roman était arrivé quelques minutes plus tôt, après avoir mis son drap de nuit sur la cage de Lilas et lui avoir souhaité bonne nuit. Frank n’était pas encore là. L’autre professeur l’avait intimidé au début, lorsqu’il était arrivé à Poudlard pour reprendre l’étude des Moldus. D’apparence plutôt sec et cassant, il gagnait en réalité à être connu et s’était avéré plutôt sympathique. Pour un grand sensible comme Roman, pour qui le comportement de ses interlocuteurs avait une grande importance, c’était un grand soulagement. Cela lui faisait appréhender cette ronde à deux beaucoup plus sereinement qu’il n’aurait pu le faire la première année, au début.

Appuyé contre un mur, resserrant autour de lui sa cape pour se tenir chaud, en gros frileux qu’il était, Roman regardait autour de lui pour guetter l’arrivée de son collègue. Enfin, des pas se firent entendre et il se redressa et se tourna dans la direction d’où venait le bruit. Il priait pour qu’il s’agisse bien de Frank. Si c’était un élève, Roman risquait de le surprendre, de lui faire peur, potentiellement de le faire sursauter, ce qui ne manquerait pas de le faire sursauter lui-même. Grand sensible, on avait dit !

Ronde Nocturne

 Ne comptant même plus les nombreuses fois qu'il avait déjà fait cette tâche qu'était la surveillance des couloirs pendant la nuit, Frank relevait le col de son long manteau noir et ajustait son écharpe avant d'aller rejoindre son collègue, Roman, pour cette fantastiquement ennuyeuse aventure. C'était bien la chose qu'il aimait le moins dans son métier. Heureusement qu'il ne devait pas faire ça seul et que Roman était là pour se tenir compagnie !

 Ses pas plutôt espacés mais rapides résonnaient dans les couloirs théoriquement vides d'élèves à cette heure-ci. Une des première choses qui l'avaient marqué pendant sa première année dans ce collège c'était sa prise de conscience quand à ces couloirs, voir tout le château, qui avaient le merveilleux avantage de ne pas posséder de chauffage, ce dont tout le monde ici se réjouissait, évidemment. Quoi de mieux en hiver que des couloir-morgues ? Après avoir frotté ses mains pour créer un peu de chaleur, ils les mis dans ses poches, se maudissant de ne pas avoir pris ses gants. Et son bonnet aussi, d'ailleurs. Ses oreilles commençaient à ressentir le manque de protection. Il est vrai que Frank était très sensible au froid, aux changements de température en général, et que peut-être, tout ceci était exagéré pour un grand gaillard aux gènes nordiques (qu'il tenait de ses grands-parents), mais Frank avait terriblement froid. En réalité, c'est un grand douillet.

 Il était bientôt arrivé au rez-de-chaussé, étage qu'il devait surveillé avec le professeur d'étude des Moldus. il aimait bien collègue-là. Un peu maladroit, un peu timide. Quand il l'avait rencontré l'année dernière, il avait tout de suite su à quel type de personne il avait affaire et comment se comporter avec lui; il a tout fait pour le mettre à l'aise et en confiance. Il estimait qu'il avait plutôt réussi.

 Le voilà au rez-de-chaussé, et de loin, il pouvait voir Roman qui l'attendait. Quand il fut assez près, il le salua.

 - Re bonjour - plutôt bonsoir cette fois - Roman! Prêt pour une nouvelle aventure dans le Poudlard supposément endormi ?

 A ses derniers mots, sentant la fatigue maintenant qu'il s'était arrêté de marcher, il se rendit compte que lui aussi aurait supposément dû être endormi. Il regretta de ne pas avoir pris son thermos de café, comme d'habitude.

 

acidbrain

Ronde nocturne

Feat. Frank Herr

Roman salua l’arrivée de Frank d’un sourire. Il était soulagé que son collègue se montre visiblement un poil plus motivé que lui à l’idée de la longue nuit qui se préparait pour eux. Dire qu’il était prêt, c’était un bien grand mot. Il s’était équipé de son écharpe et de son bonnet, mais il regrettait d’avoir oublié ses gants. Mais surtout, surtout… la nuit quasi-blanche allait être difficile. Ce n’était pas que Roman était paresseux : il était capable de rester réveillé une nuit entière pour finir un livre ou parler à des amis. Mais déambuler dans l’école avec pour mission de saisir sur le vif des adolescents empreints de liberté, c’était autre chose.

“Bonsoir, Frank. Prêt, je ne sais pas, disons plutôt que j’espère qu’ils décideront de ne pas braver le froid ce soir. Ça ne raccourcira pas notre soirée, mais au moins, nous n’aurons pas à mettre de punition !”

Les punitions… Roman détestait ça. Punir ses élèves, pour lui, c’était une forme d’échec. Il préférait de loin le dialogue et la pédagogie à une punition qu’il jugeait au fond très peu utile. Surtout chez certains qui semblaient presque s’amuser de devoir faire des lignes ou nettoyer des trophées. Des fois, il se disait qu’il fallait sérieusement qu’ils revoient le système punitif de Poudlard !

Secouant la tête, amusé par ses pensées. Roman Nightingale, le révolutionnaire ! Ça se saurait, tiens ! Selwyn serait tellement fier… Enfin, qu’il décide ou non de se lancer dans des réformes qui n’étaient pas vraiment de son ressort, il ne ferait rien ce soir, c’était certain. Il se décolla donc du mur contre lequel il était appuyé et tira sur sa cape pour la remettre en place.

“Nous devrions y aller, le crime n’attend pas !”

Et il agita vaguement les bras pour se donner un air de Batman de pacotille. Si Frank comprenait la référence, ça le ferait peut-être rire. S’il ne la comprenait pas et bien… ça le ferait peut-être rire quand même. Roman avait compris depuis longtemps que le ridicule ne tuait pas. Sinon, il serait raide depuis longtemps !

Sauf qu’à ce moment précis, Ro(Bat)man se fit surprendre par son ennemi juré, autrement dit Peeves le Farceur. Il ne l’avait absolument pas vu venir et sous le coup de la surprise et de la peur, il glapit comme un renard sur la queue duquel on aurait marché et fit un grand bond en l’air en agitant les bras. Pour le coup, il ressemblait plus à un poussin terrifié qu’à un homme chauve-souris… Son bond l’emmena juste derrière Frank par pur réflexe. Et encore, son misérable égo lui avait épargné la honte ultime qui aurait consisté à s’accrocher à son collègue.

“Peeves !! Tu n’as rien de mieux à faire ?” siffla-t-il, écarlate et le coeur battant à tout rompre. La question était stupide : non, bien sûr que Peeves n’avait rien de mieux à faire...

Ronde Nocturne

Les punitions n'était pas non plus ce que Frank préférait, en tant qu'élève quand il était plus jeune évidemment, mais aussi en tant que professeur. D'après lui, si un élève se comportait de façon fâcheuse, c'était qu'il n'avait pas compris quelque chose et qu'il fallait lui expliquer calmement (et parfois fermement) pourquoi certaines règles sont appliquées, et les conséquences de ses actes. Sur ce point, Roman et lui étaient d'accord.

Ils étaient alors sur le point de procéder à leur marche impériale - beaucoup moins impériale pour Roman cependant, qui agitait les bras comme... Batman? un Batman un mal réveillé alors - quand Peeves fit son apparition tout à fait naturelle.

Frank était habitué à Peeves. Il a toujours essayé d'avoir un minimum de contrôle sur le fantôme, mais il était tellement turbulent ! Malgré tout, il éprouvait de l'affection pour ce fantôme, parce que, il faut l'admettre, certaines fois il le faisait rire. Bon, cette fois-ci, ce fut plus la réaction de Roman qui le fit rire qu'autre chose. Alors que Frank avait lancé un grand juron en se retournant vers Peeves pour se vider de sa surprise nerveuse, Roman avait bondit si haut que Frank avait cru pendant un moment qu'il allait s'envoler et le laisser faire la ronde tout seul. Mais il ré-attérit juste derrière son dos, s'agrippant à lui et blâma Peeves, qui rigolait à en perdre ses poumons (en avait-il d'ailleurs?).

Par-dessus les rires du fantôme, Frank essaya de se donner contenance en le grondant :

- Peeves ! Ce n'est pas drôle du tout ! On n'a même pas encore commencer la ronde, à quoi tu joues ?! Va plutôt effrayé les élèves qui essaieraient de s'échapper de leur lit !

Il se tourna alors vers Roman, échangeant un regard un peu gêné, un peu amusé tandis que celui-ci se détachait de Frank.

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