Samedi 28 mai. Beaucoup bénissaient le week-end, surtout en cette période de l’année où le beau temps reprenait enfin le pas sur la pluie et le ciel grisâtre. Cela aurait donné lieu à d’excellentes journées si seulement les examens n’approchaient pas si vite ! Et malheureusement, cette période n’était pas stressante seulement pour les élèves, bien loin de là.

Perdue au milieu d’un tas de parchemins, Olivia avait passé la journée à s’arracher les cheveux crispée sur sa chaise dans une position peu confortable, dans la salle des professeurs. Elle avait tant pesté, râlé, raturé, qu’elle avait dû en agacer fortement beaucoup de ses collègues. Pourtant, elle avait une bonne raison ! Certes, l’absence de professeur de potion stable au début de l’année avait fait prendre beaucoup de retard aux élèves. Mais les examens étaient bien trop proches, et elle n’avait jamais été aussi loin de terminer ce qu’elle avait prévu. La jeune professeure redoublait donc d’effort pour pallier leurs lacunes. Malgré son caractère d’impatiente, surtout en ce qui concernait l’art noble des potions, elle restait fidèle à elle-même. Elle était somme toute, une idéaliste qui essayait toujours de privilégier le savoir, la compréhension et la clarté de ses cours, tout en restant disponible, exigeante, mais juste ce qu’il fallait... Mais cela commençait à faire beaucoup. Entre les dissertations sur divers ingrédients qu’elle donnait chaque semaine à chacune de ses classes afin d’avancer un peu, les cours particuliers qu’elle prodiguait à certains élèves, et les soirées qu’elle passait à corriger les copies, ou tenter d’aménager son programme, elle ne s’en sortait plus... Si seulement elle était douée d’un tant soit peu de méthode pour s’organiser en ce qui concernait ce côté administratif !

Mais il n’en était rien, évidemment ! La lumière du jour commençait doucement à décliner, signe annonciateur que cela faisait déjà trop longtemps qu’elle était là. Maudit week-end, maudits examens, maudit programme ! Ses yeux fatigués commençaient d’ailleurs à la picoter, et Olivia cilla plusieurs fois dans l’espoir vain de se secouer un peu, de se réveiller. Mais se croyant seule, elle abandonna rapidement la partie. A peine une dizaine de minutes plus tard, sa tête reposait sur ses bras croisés, yeux clos, près du tas de copies encore laissées de côté.

Ce fut tout d’abord la désagréable sensation du chatouillis dans son oreille qui chassa les premières brumes du sommeil de son esprit. Olivia émit un grognement disgracieux avant de remuer légèrement, sans guère plus de réaction. Mais la voix chantante qui parvint à ses oreilles la fit émerger totalement, et elle sursauta, hagarde et gênée, se redressant au milieu de tout son bazar... Face à sa collègue, Caitlin Swann.

-Oh... Mrs. Swann, je ne vous avais pas entendue rentrer.. Marmonna -t- elle d’une voix encore un peu pâteuse.

Non, sans blague ? Voilà qu’elle se comportait comme une adolescente prise en faute, devant une professeure bien plus expérimentée qu’elle. Son regard sombre se posa sur le fatras qui régnait sur sa table de travail, et son cerveau encore embrumé acheva d’assembler les dernières pièces du puzzle. Elle s’était endormie -ce n’était pas la première fois - en plein milieu de la salle des professeurs. Elle n’avait réellement aucun sens de l’organisation, et cela se faisait bien ressentir. Elle était surmenée en cette fin d’année scolaire, stressée, et de moins en moins tolérante lors de ses cours. Mais cela, son ego de jeune professeur idéaliste ne pouvait réellement le concevoir : il lui fallait un peu de temps pour prendre un vrai rythme, pour s’adapter, et puis, mince quoi ! Elle était arrivée au beau milieu de l’année, ce n’était pas facile !

Telles étaient les phrases avec laquelle elle berçait sa conscience, pour étouffer sa culpabilité. Olivia reporta son regard sur sa collègue. En comparaison, Caitlin Swann avait certes, une réputation quelque peu sévère, mais elle ne pouvait s’empêcher de l’admirer, comme la débutante estimant l’aguerrie.

-Ahem, je vais ranger tout ça... Avec les examens qui approchent, j’ai un peu de mal à m’organiser ... Fit-elle, un peu gênée. Ce genre d’aveu lui arrachait la bouche, mais il fallait bien ouvrir les yeux face à l’évidence...